Pinocchio
Quand la marionnette échappe à son créateur et devient incontrôlable.
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Connaissez-vous le syndrome de Pinocchio ? Le pauvre Geppetto ne pensait pas que son pantin lui en ferait voir de toutes les couleurs. Qui plus est, sa propension à mentir pour couvrir ses fautes l'entraîne dans une fuite sans fin.
Nos organisations professionnelles agricoles, créées par nos parents et grands-parents, ont depuis quelque temps tendance à devenir des entités qui génèrent de l'activité pour continuer d'exister. Certains présidents et directeurs n'auraient-ils pas le nez qui s'allonge ? Je ne parle même plus de nos banques-assurances et assurances-banques qui, bien qu'issues de nos petites caisses locales, sont devenues des fleurons de l'industrie des services. Les frais bancaires explosent sans vraiment de justification : 16 € pour augmenter le plafond de retrait d'une carte bancaire alors qu'il suffit d'appuyer sur un clavier... Elles conservent un conseil d'administration local qui semble bien symbolique pour justifier d'un statut coopératif. Pendant ce temps, au siège social en région parisienne, les agriculteurs élus au conseil d'administration émargent à des dizaines de milliers d'euros, voire plus de 100 000 €. J'ai les noms et les montants si ça vous intéresse.
Plus près de nous, nos centres de gestion jouent sur la complexité de la réglementation et la crainte des contrôlespour vendre leurs services à des agriculteurs dépassés, qui ont peur de mal faire, ou qui ne cherchent plus à comprendre et préfèrent se reposer sur des « pros », quitte à en payer le prix fort. Tous ces spécialistes (juristes, conseillers...) « beurrent gras » sur les factures.
Nos contrôles laitiers et nos GDS se régionalisent, s'interrégionalisent même, pour optimiser leurs forces vives. Gloire leur soit rendue car depuis le temps qu'on les tanne pour qu'ils se restructurent et diminuent leurs charges, ils ont enfin compris. Presque. Car, comment expliquer que quand le GDS embauche des vétérinaires, le contrôle laitier en fasse autant. Quand ce dernier recrute des pédicures, le GDS aussi. N'y aurait-il pas là matière à un peu plus d'harmonisation et de rationalisation ? Il ne faut pas s'étonner que des privés reconnus et adoubés récemment par l'administration leur taillent des croupières. La plupart des administrateurs (et j'en suis un) sont persuadés de l'intérêt de leur mandat pour défendre les valeurs prônées par leur association. Mais parfois, les orientations et l'évolution de la structure s'éloignent des fondamentaux de nos pères. Certes, il faut évoluer avec son temps, mais pas au détriment des adhérents.
Trente ans de quotas auront permis à la France de produire moins de lait qu'en 1983, de diviser le nombre de ses producteurs par quatre et d'être payé en 2015 au prix de 1990. Si vous reprenez votre comptabilité, vous verrez que les montants des honoraires, services et taxes ont bien suivi l'inflation et que nous entretenons de plus en plus d'administratifs et cadres de toutes sortes, ramené au nombre de producteurs. Par contre, les emplois dans la transformation de nos produits (abattoirs...) sont en forte baisse. Dans le jargon associatif, on parle « des tifs et des teurs » qui sont les diminutifs d'administratifs et d'administrateurs. Logiquement, « associatif » devrait donc être le regroupement des administratifs. Sinon, on devrait dire « associateurs ». Si l'administrateur est un producteur, l'administratif est un productif ? (attention à bien l'écrire car à l'oral, on peut entendre « improductif »). Le producteur est-il productif ? Souvent, mais pas forcément. Et l'administratif, est-il producteur ? De paperasse et de réglementations. Je sais, c'est facile mais ça détend.
PASCAL POMMEREUL
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